Plus d’anticipation, c’est moins de gaspi !Plus d’anticipation, c’est moins de gaspi !

Plus d’anticipation, c’est moins de gaspi !

La jeune entreprise GreenVillage a mis au point un logiciel facilitant l’approvisionnement et la gestion des achats de fruits et légumes.

Plus d’anticipation, c’est moins de gaspi ! 1La jeune entreprise GreenVillage a mis au point un logiciel facilitant l’approvisionnement et la gestion des achats de fruits et légumes. Résultat : une gestion du rayon plus dynamique et moins de démarques.

«Pour lutter contre le gaspillage des fruits et légumes, il est plus efficace d’agir en amont, en anticipant les besoins de la vente et en facilitant la collaboration entre les acteurs de la chaîne », résume Mejda Naddari. C’est en partant de ce constat simple que cette ancienne directrice de magasins et de l’enseigne Bio c’Bon s’est lancée en 2018 dans l’aventure de GreenVillage. Cette jeune entreprise de la pépinière Rungis&Co développe depuis deux ans une solution logicielle de gestion intelligente et collaborative d’approvisionnement des fruits et légumes. Son but : « Fluidifier les relations entre acheteurs et fournisseurs de la filière fruits et légumes et ainsi limiter la démarque et le gaspillage alimentaire », définit sa fondatrice.
« Mon expérience m’a permis de constater que la gestion des stocks des fruits et légumes est souvent réalisée de façon rudimentaire en magasin, sur un fichier EXCEL ou même sur papier, alors que ce sont des produits qui réclament beaucoup de réactivité dans les réassorts », souligne Mejda Naddari. « Ce manque de rationalisation fait que soit l’on se limite et l’on est obligé de multiplier les achats d’appoint ; soit l’on se couvre trop en produits au risque d’aboutir à une importante démarque, voire d’avoir à jeter. »

Plus d’anticipation, c’est moins de gaspi ! 3La solution logicielle mise au point par GreenVillage vise à réduire ces risques en amont en harmonisant la relation commerciale entre le distributeur ou le détaillant et leur grossiste. « La première fonctionnalité est celle de la gestion des stocks », précise Mejda Naddari. « Le responsable de rayon ou l’acheteur ont accès en un clic et en temps réel à leur état des stocks et de leur démarque sur leur terminal », détaille Mejda Naddari. Un algorithme breveté, alimenté d’une part par les données internes du magasin (historiques des ventes, saisonnalité, démarques, etc.) et d’autre part par des informations externes (météo, contexte sanitaire), permet de prévoir les commandes nécessaires et d’en informer les fournisseurs. Selon la fondatrice de GreenVillage, l’outil permet d’obtenir une diminution moyenne de la démarque de 30 %, mais aussi de limiter considérablement le temps consacré aux commandes. Sur cette base de fonctionnalités, GreenVillage a développé une panoplie de modules qu’elle met au point en partenariat avec ses prospects (lire encadré). « La principale est la constitution de catalogues chez nos clients fournisseurs. Ceux-ci viennent s’incrémenter directement sur le terminal des acheteurs et ils peuvent être envoyés à tout ou partie d’une base de clients. » L’interface a été conçue de manière à permettre aux clients de faire des commandes ou des précommandes en fonction des stocks ou de l’activité à venir. « Nous avons mis au point beaucoup d’autres options ces derniers mois, comme le calcul automatique des prix de vente conseillés ou encore l’édition des bons de livraison », ajoute Mejda Naddari. L’outil développé par GreenVillage n’a pas tardé à susciter un l’intérêt de la filière fruits et légumes. « Notre première clientèle est celle des magasins de détail, des supermarchés et hypermarchés, pour qui nous avons développé un produit dédié », enchaîne l’entrepreneuse. « Un certain nombre de magasins n’ont pas d’acheteurs dédiés pour les fruits et légumes et naviguent à vue en matière d’approvisionnement. Notre solution leur permet d’apporter de la rigueur et de l’efficacité dans la relation avec les fournisseurs. » Après avoir convaincu nombre d’indépendants, GreenVillage est aujourd’hui en négociation avancée avec une enseigne nationale.
Mais la solution intéresse aussi les primeurs, la solution facilitant leurs relations avec leurs fournisseurs réguliers. « La nouvelle génération y est particulièrement sensible », note Mejda Naddari. Le groupe de magasins de primeurs parisiens Mestaoui, propriétaire du grossiste rungissois Prière et Zalher, teste actuellement les solutions logicielles de GreenVillage (lire encadré).
« Notre solution n’a pas vocation à remplacer le travail ni des commerçants ni des grossistes, insiste Mejda Naddari. Elle simplifie des opérations souvent réalisées manuellement et qui occasionnent des pertes de temps et permet aux professionnels de se concentrer sur leur métier de sourcing et de logistique d’une part et de sélection des produits d’autre part. » La solution ouvre également la voie à un travail plus collaboratif entre grossistes et détaillants dans une logique de développement des volumes et d’adaptation des prix.
La fondatrice de l’entreprise s’est fixé pour objectif d’embarquer un maximum de magasins sur sa solution pour les mettre en relation avec des grossistes. Récompensée par le label d’État Greentech Innovation accordé par le ministère de l’Écologie, Greenvillage a également été retenue par BPI pour exposer au prochain salon Produrable, qui aura lieu du 15 au 17 septembre. « Nous sommes en train de montrer que la réponse au gaspillage alimentaire ne se résout pas seulement en aval, mais aussi en calibrant l’offre et la demande », conclut Mejda Naddari.
Bruno Carlhian

« La digitalisation, un impératif quand on grandit »

Partenaire de GreenVillage depuis 2018, le grossiste Prière et Zalher s’est laissé convaincre par l’intérêt des solutions proposées par la jeune entreprise rungissoise. « La digitalisation constitue un levier très utile pour simplifier et rationaliser les procédures dans une entreprise en croissance comme la nôtre », affirme d’emblée Lamia Mestaoui, dont la famille de détaillants primeurs a repris en 2017 l’entreprise du pavillon E2 à Rungis. « L’outil nous a semblé particulièrement adapté à nos besoins très spécifiques », détaille l’une des filles du « patriarche » Jamel Mestaoui de l’entreprise, qui a été affectée à la maison de gros. Le groupe dispose en effet de sept magasins à Paris à l’enseigne Au bon jardinier qu’il convient d’approvisionner quotidiennement au plus juste de leurs besoins. « Nous sommes en train de déployer la solution sur toute la chaîne, les responsables de magasins, les acheteurs et le grossiste, ce qui va permettre de gérer l’ensemble du flux », précise Mejda Naddari.
Concrètement, les magasins expriment leurs besoins sur un module de commande en ligne installé sur leur terminal mobile ou leur poste de travail où ils ont accès au stock, à la recommandation de commande, aux PVC… Ils peuvent commander chez Prière et Zalher quand les produits sont disponibles ou auprès de leurs autres fournisseurs habituels. « Quand nous disposerons du catalogue d’autres grossistes, nous pourrons les mettre en ligne et les primeurs n’auront plus que ça, faire les enlèvements chez eux », complète Mejda Naddari.
De leur côté, les acheteurs des magasins, qui viennent quotidiennement à Rungis, utilisent lors de leurs venues le module d’achats depuis leur terminal mobile pour traiter les commandes et synchroniser les actions d’enlèvement et de livraison entre les préparateurs et les chauffeurs et avec les magasins. « Nous sommes aussi en train de mettre en place chez Prière et Zahler le module catalogue en ligne. Cela va permettre au grossiste de diffuser son offre produits à tous ses clients via WhatsApp, courriel ou directement dans l’application GV. Les clients pourront précommander ou commander directement en ligne », justifie Mejda Naddari. « Notre objectif, c’est de pouvoir mettre ce catalogue à disposition des clients, en fonction de leur profil, intervient Lamia Mestaoui. Cela va faciliter la vie de nos clients actuels, notamment ceux de province, mais aussi de prospecter de nouveaux clients. À terme, nous pourrons diffuser des promotions ciblées à certains clients. »
L’objectif de la lutte contre le gaspillage reste en effet dans la ligne de mire. « La solution doit nous permettre de mieux gérer nos stocks et de pouvoir dégager les surplus qu’on ne peut pas sortir sur le carreau », indique Lamia. GreenVillage s’est mis en relation avec des acteurs de l’économie sociale et solidaire auxquels il sera proposé d’être mis dans la boucle de la solution logicielle. « Pour trouver les bons interlocuteurs dans ce domaine, il est important d’élargir à de nouveaux acteurs », estime Mejda, qui signale que plusieurs industriels se sont déjà montrés intéressés.

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