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Nos régions ont du goût

Japon

Soleil levant sur les assiettes françaises

Le Japon bénéficie d’une histoire culinaire à la fois traditionnelle et inventive. Le pays exporte ses spécialités dans le monde entier, en particulier en France où l’on apprécie le raffinement et l’originalité de saveurs en rupture avec nos habitudes.

Japon 1Il faut se rendre à l’évidence : les Français ont bel et bien intégré la gastronomie japonaise à leur culture culinaire. Sushi, yakitori, ramen, bœuf Wagyu… font désormais partie du paysage gastronomique français, grâce à leur diffusion à grande échelle dans la multitude de restaurants nippons qui ont ouvert leurs portes dans l’Hexagone ces dernières années.
Mais ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. En effet, la gastronomie japonaise, loin d’avoir livré tous ses secrets, se révèle d’une grande richesse, des spécialités les plus exubérantes comme les pastèques carrées à plus de 100 € la pièce au célèbre fugu, un poisson « poison » s’il n’est pas bien préparé, aux autres productions plus subtiles à l’image des produits fermentés comme l’ail noir, le miso, les sauces soja affinées… « Sushis, sashimis, yakitori et tempura ne représentent même pas 1 % de la gastronomie japonaise », explique Olivier Derenne, principal importateur français de produits japonais haut de gamme avec sa société SASU. « Le potentiel reste donc énorme. Mais si trouver de nouveaux produits est rapide, les faire adopter est beaucoup plus lent. J’estime qu’aujourd’hui je n’ai exploré que 40 % de ce que le Japon peut nous offrir. »
Olivier Derenne propose 1 500 produits frais, surgelés et secs dans ses boutiques ainsi que sur le site www.nishikidori.com. Le premier produit qu’il a commercialisé en 2008 était l’ail noir. « J’ai commencé à importer quelques colis, puis quelques palettes et maintenant ce sont des containers. Les utilisateurs ne sont pas des restaurants japonais, mais des chefs français ou étrangers qui ne veulent pas japoniser leur cuisine mais plutôt proposer de nouvelles saveurs, essayer des choses différentes, se distinguer par rapport à la concurrence. La cuisine française s’ouvre sur le monde et les ingrédients japonais y trouvent naturellement leur place : sauce soja de 30 ans d’âge et plus, miso fermenté à base de riz, de riz et de soja ou d’avoine, d’algues, de vinaigres, de jus d’agrumes notamment de yuzu… »
Aujourd’hui, la filière agroalimentaire japonaise est dynamique et innovante. « Leur point faible est le manque d’espace, mais les Japonais compensent par leur inventivité », analyse Olivier Derenne. « Ils ont une capacité énorme à copier en améliorant et en adaptant à leurs goûts. C’est un peuple qui se remet en question en permanence. Ils ne vivent pas sur leurs acquis, ça tient à leur éducation. » Si le poids de la tradition est lourd, les Japonais savent évoluer avec leur temps. « L’exportation des produits japonais vers l’Europe ne date que d’une vingtaine d’années, poursuit l’expert. Pour pouvoir expédier davantage, le Japon doit se conformer aux mesures sanitaires européennes. Cette adaptation ne se fera pas en six mois, il faudra certainement plusieurs années. »

Une adaptation aux tendances européennes

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Cette évolution concerne notamment les additifs controversés auxquels les consommateurs japonais sont désormais beaucoup plus sensibilisés. « Le problème au Japon c’est qu’il y a de nombreux additifs alimentaires autorisés qui sont interdits chez nous », souligne Olivier Derenne. Après la Seconde Guerre mondiale dont le pays sort exsangue, la population se contente d’une alimentation assez sommaire, essentiellement à base de légumes racines. Une société agroalimentaire va alors proposer une nouvelle panoplie d’exhausteurs de goût pour créer, avec un énorme succès, ce qui va devenir ensuite le « goût japonais », l’umami. Dans ces produits, il y a le mono sodium glutamate (MSG ou E 621), très controversé en France, notamment accusé de favoriser l’obésité. « Les Japonais ont pris conscience de cela et ils demandent de plus en plus de produits sans MSG, relate Olivier Derenne. La pérennité de cette tendance n’est cependant pas acquise, le Japon fonctionne avec des modes qui sont souvent beaucoup plus volatiles que chez nous. »Concernant le bio également, les cultures divergent. « Au Japon, la majorité des produits bio (fruits et légumes, condiments, jus…) ne sont pas conformes aux exigences européennes, poursuit l’importateur. Il faut analyser les produits à leur arrivée car il y a de nombreuses certifications bio, mais la plupart des filières ne sont pas agréées pour l’Europe. »
Outre les produits de la mer ou de l’élevage, le produit roi au Japon est bien sûr le riz, avec des qualités et des usages multiples. Le riz est aussi bien consommé cuit qu’utilisé dans la fabrication du vinaigre (komezu), du saké, du mirin (alcool utilisé en cuisine) ou encore de crackers nommés senbei. C’est aussi l’un des composants de la pâte miso, ingrédient indispensable à la cuisine japonaise. Le mochigome ou riz gluant, quant à lui, sert pour la confection des mochis, gâteaux de riz traditionnels. Bien plus qu’une simple céréale, le riz est donc un aliment essentiel dans la cuisine et la culture japonaises.

La pêche, secteur en crise

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L’industrie de la pêche japonaise, autrefois leader mondial, décline aujourd’hui à cause de la surpêche, notamment la ressource de thon rouge qui pourrait tomber à zéro en 2050. Heureusement, des quotas ont été mis en place et la ressource halieutique donne des signes de redémarrage, cependant loin des volumes des années 1970 à 1990, époque où le Japon était le premier pêcheur au monde. La crise de la pêche subsiste donc encore, mais les Japonais, grands consommateurs de poissons, peuvent désormais également compter sur l’élevage, qui se développe dans l’archipel.

La pêche pourrait aussi connaître un phénomène de régulation avec le report de consommation croissant des jeunes générations sur la viande, de bœuf notamment.

La sauce soja, fondement de la gastronomie japonaise

La sauce soja, Shoyu au Japon, est le condiment emblématique de la cuisine japonaise. Si elle a été inventée en Chine, les Japonais ont su la transformer et la faire évoluer. À la différence de la Chinoise composée de graines de soja, d’eau et de sel, la sauce soja japonaise contient la plupart du temps du blé en plus, ce qui lui confère des arômes plus subtils et légers et un goût moins salé. « La sauce soja japonaise est produite artisanalement par quelque 1 500 producteurs », précise Olivier Derenne. Elle est de couleur noire, se décline en affinages de 2 à plus de 35 ans d’âge, et peut coûter plus de 100 € pour quelques millilitres. Dans sa version blanche, la sauce est appréciée des cuisiniers et, dans sa version sucrée de tous les amateurs de saveurs nippones. Il existe également des pierres de sauce soja, elles aussi peuvent être vieillies jusqu’à 10 ans. Elles se râpent directement sur les plats, aussi bien viandes, poissons que fruits et glaces.

Les Français ont adopté le Saké

Un autre produit se développe de façon exponentielle en France depuis plusieurs années, c’est le saké. Ce breuvage traditionnel est un vin de riz non distillé, qui titre en moyenne 15 °. « Il n’a rien à voir avec l’infâme breuvage que l’on nous sert dans certains restaurants et qui nous brûle le palais en fin de repas ! », s’insurge Olivier Derenne. On le déguste donc tout au long du repas et il accompagne parfaitement viandes et poissons.
Le saké se place en n° 2 des importations de boissons alcoolisées japonaises en France après le whisky. La demande croît chaque année et les importations françaises ont bondi en 10 ans de 66,30 M€ à 181,50 M€. Une histoire d’amour en devenir.

Caroline Maréchal

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Le Japon a ses quartiers à la Maison Le Delas

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Parce que le patron Antoine Boucomont a compris depuis longtemps que les Français ont une affinité particulière pour les saveurs asiatiques, Le Delas propose une vaste gamme de produits japonais. De quoi découvrir les grandes spécialités du pays, à commencer par le bœuf Wagyu, réputé dans le monde entier pour donner une viande persillée, savoureuse, au fondant exceptionnel. Le magasin propose également toute une gamme de grands sakés d’Hiroshima. Enfin, les condiments, piliers de la cuisine japonaise, sont également disponibles : vinaigres, sauces Ponzu Yuzu, sauces soja, Miso, pâte de soja, bonite séchée, ail noir, thé vert… de quoi rajouter un peu de la subtilité des goûts japonais et réveiller certaines recettes.

Le Salon du saké est de retour en 2021

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Le Salon du saké et des boissons japonaises se tiendra cette année à Paris du 2 au 4 octobre. Annulé l’année dernière pour cause de crise sanitaire, l’événement avait connu en 2019 un succès sans précédent avec 5 129 visiteurs en 3 jours (+ 10,2 % vs 2018) venus découvrir les quelque 500 différents sakés proposés à la dégustation. Parmi les visiteurs, + 39 % de cavistes et une grande majorité de professionnels de la gastronomie, restaurateurs, traiteurs, sommeliers… Cette année, le programme se compose de plus d’une trentaine de conférences, d’ateliers, de master class et de tables rondes. Sans oublier les ateliers de dégustation où l’on vient expérimenter des accords cuisine française (ou autre) et sakés japonais. Un défi relevé par certains chefs français, japonais ou européens qui viendront présenter leurs créations originales autour de la boisson nippone.

Le bœuf Wagyu, l’excellence japonaise tracée au QR code

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Le fameux bœuf japonais n’en finit pas d’attiser la convoitise du monde entier. En 2019, le pays en a exporté pour un chiffre d’affaires de 24,7 milliards de yens (186 M€), contre à peine 5 milliards (36,80 M€) 6 ans plus tôt.

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Devant cette nouvelle manne, les abattoirs se modernisent et certains proposent déjà la certification Halal. « Wa » signifie Japon et « gyu » bœuf en japonais. La particularité du Wagyu japonais réside d’abord dans son aspect. Le persillage blanc est plus marqué que chez les autres viandes bovines. Les Japonais recherchent cette viande blanche et grasse qui possède une texture fine et très juteuse qui contient beaucoup d’acides aminés, à l’origine du fameux goût umami. Mais cela fait maintenant plusieurs années que cette race est sortie des frontières japonaises. En effet, en 2014, lorsque l’importation du Wagyu japonais est autorisée en Europe, non seulement le Wagyu américain et le Wagyu australien sont déjà proposés à nos consommateurs, mais l’élevage de ce bœuf d’origine japonaise est également en train de s’étendre sur toute l’Europe. Afin de distinguer le Wagyu du Japon des productions étrangères, le Conseil pour la promotion des exportations des produits japonais d’origine animale a décidé de préciser « Wagyu japonais » tel qu’on le ferait pour une appellation d’origine géographique.
Au Japon, le Wagyu est élevé dans l’ensemble des 47 préfectures. Les éleveurs de chaque région adaptent leur savoir-faire en fonction du climat et de l’environnement. Chaque Wagyu né et élevé au Japon dispose d’informations d’identification individuelle enregistrées par un système de traçabilité. Afin de partager ces précieuses informations avec les professionnels, le Conseil pour la promotion des exportations des produits japonais d’origine animale a mis en place un code QR sur chaque morceau de Wagyu japonais.

 

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Une fois scanné, le code QR affiche toutes les informations concernant l’animal : date de naissance, sexe, race, état d’enregistrement au Conseil, lieu d’élevage et date d’abattage ainsi que niveau d’engraissement. Mais également des informations sur la typicité du Wagyu japonais, la meilleure façon de le découper, les idées de recettes et des conseils de chefs en 15 langues différentes.

La méthode ikejime sublime les poissons

Japon 11Le poisson ikejime se développe énormément en France. Il s’agit d’un poisson abattu selon une méthode japonaise douce, qui respecte l’animal et lui confère de nombreuses qualités organoleptiques. Il est d’abord arrivé dans la restauration sur les grandes tables, avant de se retrouver aujourd’hui sur les étals des poissonniers. La France n’importe pas de poissons japonais, car les faire venir n’est pas viable économiquement. En revanche, le matériel nécessaire à la pratique de cette méthode d’abattage est importé. L’Ikejime concerne le poisson de mer comme le poisson de rivière. Ce process a un impact très important sur la texture, la souplesse de la chair et sur le goût. L’ikejime a donc un réel avenir dans un pays comme la France qui apprécie les bons produits et se soucie du bien-être animal. En plus, la technique s’applique à des poissons d’eau douce à médiocre réputation et peut les rendre meilleurs, tant leur goût que leur texture. Un excellent moyen de faire revenir dans les assiettes la carpe, la tanche, la perche…