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La langue de bœuf, remède à la morosité

Alors que le secteur des produits tripiers est mis à rude épreuve depuis le début de la crise du Covid-19, les abats constituent des alliés culinaires de choix dans la conception de plat canaille, véritable remède culinaire à la morosité.

Avec la joue, l’onglet, les rognons ou la hampe, la langue apparaît au rang des abats les plus prisés chez le bœuf. À choisir courte et épaisse plutôt que longue et fine, sa taille imposante en fait un plat idéal pour les grandes tablées. La langue de bœuf figure parmi les abats rouges les plus répandus sur l’étal des tripiers, profession dont les origines remontent au XIe siècle. En 1096, la Grande Boucherie s’installe au pied du Châtelet et les premiers professionnels des tripes et des abats apparaissent concomitamment. Le métier de tripier n’apparaît toutefois dans un document officiel qu’en 1292. On dénombre alors trois tripiers parisiens, portant également les casquettes de cuisiniers, vendeurs de tripes et d’abats de bœuf et de mouton. Huit ans plus tard, un nouveau recensement en dénombrait six.

Au XVIe siècle, six familles se partagent le monopole de l’achat de produits tripiers aux bouchers : les abats rouges de bovins et les abats blancs de veaux étaient alors l’apanage des bouchers. Les tripiers obtiendront finalement des autorités le monopole de la vente des abats rouges de bœuf et d’agneau en 1782. Les bouchers reçoivent l’interdiction de commercialiser ces morceaux. Enfin, en 1830, les tripiers ont finalement l’autorisation de vendre les abats de veau, qui étaient là encore réservés aux bouchers. Avec le transfert des Halles de Paris à Rungis dans les années 1970, un pavillon de 2 800 m2 accueillait à l’époque 33 grossistes en produits tripiers. Même si les tonnages et le nombre d’acteurs dans le secteur des produits tripiers a baissé (le pavillon compte aujourd’hui une dizaine d’entreprises), les abats bénéficient ces vingt dernières années d’un regain d’intérêt, portés par la restauration et sa jeune garde. Si des institutions, à l’instar du célèbre Veau qui tête, sont de véritables temples des produits tripiers, la gastronomie s’est réapproprié ce type de morceaux. Les ris de veau, par exemple, font florès sur les cartes de certains chefs étoilés : Guillaume Sanchez, Nicolas Conraux ou encore Tomy Gousset. Pour tous ces chefs, les abats constituent un vaste terrain de jeu culinaire et la langue de bœuf n’échappe pas aux expérimentations. Pièce charnue, la langue se révèle excellente en pot-au-feu. L’une de ses recettes les plus traditionnelles n’est autre que la langue à l’écarlate, mais celle-ci peut aussi s’accommoder froide, en petites quantités, dans des salades composées.

Les abats ont beau bénéficier d’une belle image dans le secteur de la restauration, les ménages en sont moins friands que par le passé. Les derniers chiffres publiés par FranceAgriMer en début d’année montrent une forte érosion des achats des ménages pour leur consommation ces derniers mois : en novembre dernier (pourtant le mois des produits tripiers), les achats d’abats ont reculé de 12,3 % par rapport à la même période en 2018 (- 15,4 % pour le bœuf et - 12,8 % pour le veau). De son côté, la Confédération nationale de la triperie française (CNTF) explique que le volume global commercialisé tend à baisser (- 3,9 %, soit 33 000 tonnes l’année dernière).

M. R.

Connaissez-vous la recette de la... Langue de bœuf, sauce gombos au riz

A tester chez vous sans plus attendre !

Que boire avec...Le langue de bœuf

Qui dit bons produits, dit bon vin !