Ils croyaient pourtant bien faire. En qualifiant de « mignon » le muscle très peu sollicité (et donc très tendre) situé au milieu du dos du porc, de part et d’autre de l’échine, entre le filet et les côtes filet, nos ancêtres gastronomes étaient convaincus que cette appellation ferait florès. Ils pensaient qu’ils donneraient ses lettres de noblesse à ce morceau succulent – c’est-à-dire gorgé de sucs – qui mesure en moyenne 30cm et pèse généralement 500g. D’autant que c’est une viande très maigre qui contient moins de 2g de lipides pour 100g…
C’était sans compter sur la francophilie des Américains, qui adorent parler de « femme fatale », « déjà vu » et autres « ouh la la ! ». Et donc de « filet mignon ». Seulement voilà, le filet dont ils parlent est celui de bœuf (voire tout bifteck un peu tendre) si bien qu’un Américain de passage à Paris est tout désappointé quand on lui sert une viande blanche et qu’à l’inverse, un Français à New-York a l’impression que le filet mignon qu’il voit arriver dans son assiette est particulièrement rouge… Bah, me direz-vous, ce n’est pas la première fois qu’il y a une incompréhension entre les deux rives de l’Atlantique. « C’est la vie ! », comme on dit à Boston.