Tous ceux qui affirment que l’habit ne fait pas le moine peuvent citer le saint-pierre, ce poisson hideux de la famille des zéidés qui mesure 30 à 50cm en moyenne et qui vit sur les fonds rocheux, pour appuyer leurs dires. Certes, il n’est pas seul dans son cas : la sole toute aplatie avec sa bouche minuscule et la lotte ne sont pas à proprement parler des top-modèles. Mais avec son énorme tête qui représente près d’un tiers de son corps, sa mâchoire proéminente qui lui donne l’air d’un prognathe et ses nageoires dorsales garnies d’épines, le saint-pierre bat tous les records. Pour ne rien arranger, il a deux tâches noires sur le corps (la légende raconte qu’il s’agit des empreintes de Saint Pierre qui voulait retirer une pièce d’or de sa bouche) qui font penser à un tatouage raté.
Si on voulait l’accabler, on ajouterait que ce poisson que l’on surnomme « Jean Doré » à Boulogne, « soleil » à Dunkerque et « poule » à Concarneau, laisse sur le bord de l’assiette 60% de déchets. Mais que dire des 40% restant sinon qu’ils sont d’une telle finesse que les mots nous manquent pour dire le ravissement qui vient avec chaque bouchée (ravissement doublé de la satisfaction de savoir que ce poisson maigre est riche en protéines) qui nous font dire que ce poisson moche à des qualités divines !