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Nos régions ont du goût

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Pays de grands vins et de grands fromages

Pays de grands vins et de grands fromages, le Jura est aussi le pays des dinosaures et du sel. Ce département recèle de véritables trésors de notre patrimoine gastronomique.

L’histoire du Jura se confond avec celle de la Franche-Comté, jusqu’à la création du département en 1792. Sa géologie est si particulière, que ce nom de département a donné, au XIXe siècle, l’appellation « jurassique ». Le Jurassique est « la période géologique de formation des roches calcaires et marines ». Il s’étend de - 201 à – 145 millions d’années, ce qui ne nous rajeunit pas. C’est un Français, le géologue et naturaliste Alexandre Brongniart (fils d’Alexandre-Théodore Brongniart, l’architecte de la Bourse de Paris) qui est « l’inventeur » de cette dénomination. Des traces des dinosaures sont parfaitement conservées et visibles sur plusieurs sites du département, comme ceux de Loulle ou de Coisia. Cette géologie particulière et complexe marque encore le Jura dont le climat est rude « de type semi-continental à montagnard », malgré son altitude modeste.
Du point de vue agricole, le Jura est avant tout un département d’élevage : 77 % des exploitations. 45 % de l’ensemble des fermes du département ont une activité d’élevage de bovins pour le lait. Ce type d’exploitation est valorisée par trois AOP laitières : le comté, le morbier et le bleu de Gex. On note aussi la présence d’élevages ovins, caprins, porcins et aussi de volailles. L’autre spécialité agricole du département est la vigne. Au total, selon les derniers chiffres de la chambre départementale d’agriculture, le Jura compte 2 966 exploitations agricoles pour 208 864 ha de surface agricole utile (SAU), soit 41 % de la surface totale du département.

Trois AOC fromagères

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Les exploitations sont de taille modeste : la SAU moyenne est de 60 ha (contre 81 ha pour la moyenne nationale). L’agriculture biologique est plutôt bien installée. On compte plus de 200 fermes certifiées, dont un quart en production de lait pour le comté, un quart en viticulture, 13 % en maraîchage et 12 % en bovins viande. Il est à noter par ailleurs que près de la moitié de la superficie du département est recouverte de forêts. Le département dispose ainsi d’une AOC bois du Jura (lire encadré p. 27). Le comté est par ailleurs le fromage du massif du Jura. Son aire d’appellation s’étend sur les départements du Jura, du Doubs et en partie de l’Ain. Le lait à comté ne peut être issu que de deux races de vaches : la Montbéliarde et la Simmental française. Il est fabriqué dans plus de 150 fruitières reparties sur l’ensemble du massif jurassien. Plus de 1 650 000 meules sont produites chaque année (lire aussi Rungis Actualités n° 743 de septembre 2018).
Autre fromage emblématique de la région : le morbier. C’est également une AOP que l’on trouve dans le Jura et dans le Doubs (et aussi dans quelques communes de l’Ain et de Saône-et-Loire). L’hiver, quand les fermiers de la région n’avaient pas assez de lait pour produire les grosses meules de comté, ils faisaient cailler celui du matin et le recouvraient de cendres. En fin de journée, ils complétaient la préparation avec le caillé du soir. C’est l’origine de ce fromage au lait cru de vache, à pâte pressée non cuite, reconnaissable à sa ligne cendrée. Il fut communément dénommé morbier à la fin du XIXe siècle. Il obtint son AOC en 2000 et son AOP en 2002. Comme pour le comté, le lait doit être exclusivement issu des vaches de race Montbéliarde et Simmental française. Désormais, on n’utilise plus la cendre pour obtenir la raie centrale, mais du charbon végétal. Le croûtage est obtenu par frottage à l’eau salée. La production annuelle du morbier s’élève à 8 500 tonnes environ. Le troisième fromage bénéficiant d’une appellation est le bleu de Gex. On peut aussi le trouver sous les dénominations bleu du Haut-Jura ou bleu de Septmoncel. Il est produit dans les montagnes du Haut-Jura, à cheval sur les départements du Jura et de l’Ain. Ce sont des moines savoyards qui apportèrent avec eux ce fromage lors de leur installation à l’abbaye de Saint-Claude, au XIIIe siècle. Là encore, le lait doit provenir de vaches de race Montbéliarde ou Simmental française. Quatre entreprises se partagent la fabrication du bleu de Gex pour un volume annuel d’environ 500 tonnes. Notons enfin que certaines communes du Jura se situent dans les zones des IGP « emmental français est-central » et gruyère. Quand elle ne part pas dans les trois appellations, la production laitière peut servir à faire des tommes, du fromage à raclette ou encore la célèbre cancoillotte. Mais le Jura, c’est aussi le pays du fromage fondu le plus consommé dans le monde : La vache qui rit. Elle est fabriquée à Lons-le-Saunier depuis 1921 et vendue dans plus de 120 pays.

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Un vignoble, cinq cépages, sept AOC

Les vins sont l’autre pilier de l’agriculture et de la gastronomie jurassienne. « Petit par sa taille, mais grand par son exceptionnelle diversité, le vignoble jurassien s’étire sur 80 km le long du Revermont », annonce le Comité interprofessionnel des vins du Jura. Le Revermont, c’est le nom de la région naturelle qui constitue les premiers contreforts du massif du Jura, le vignoble aux sept AOC (quatre AOC géographiques et 3 AOC « produits ») et aux cinq cépages : le chardonnay, le savagnin, le pulsard, le pinot noir et le trousseau. Notons, à propos du savagnin, qu’un concours des meilleurs vins du monde à base de ce cépage est organisé chaque année dans le Jura.
L’arbois fait partie des cinq premières AOC viticoles historiques créées par le décret du 15 mai 1936. Elle est ainsi la plus ancienne, mais aussi la plus étendue, des quatre AOC géographiques. Son nom serait d’origine celte (« ar » et « bos » signifiant « terre fertile »). L’appellation est répartie sur 12 communes pour une superficie de 766 hectares. La production annuelle avoisine les 30 000 hectolitres. L’AOC arbois représente environ 70 % des rouges et 30 % des blancs jurassiens. Les cinq cépages autorisés dans le Jura rentrent dans la composition de l’AOC arbois. Deuxième AOC en volume, côtes-du-jura (appellation obtenue en 1937) est la plus vaste des appellations jurassiennes, puisqu’elle s’étend du nord au sud du vignoble. Quelque 550 hectares, répartis sur 105 communes, sont en production. Les deux autres appellations géographiques (elles aussi obtenues en 1937) sont plus modestes en superficie et en volume. L’étoile s’étend sur 67 hectares. Le vignoble se compose essentiellement de chardonnay. On trouve aussi du savagnin et un peu de poulsard. L’origine du nom « étoile » reste en parti mystérieux. Il vient soit du fait que son terroir est entouré de cinq collines formant les branches d’une étoile, soit parce que l’on trouve à fleur de sol des étoiles fossiles, les pentacrines. Soit peut-être des deux… L’ AOC château-chalon (décret du 29 mai 1936) produit, selon l’interprofession, « l’un des plus grands vins du monde » (Curnonsky le classe même comme l’un des cinq meilleurs vins blancs du monde). Ici, un seul cépage, le Savagnin, et une seule destination, la fabrication du vin jaune. L’excellence se mérite. Les 60 hectares de l’appellation sont contrôlés tous les ans, avant les vendanges, par une commission qui doit vérifier la qualité du raisin et le déclarer apte à produire du vin jaune (lire encadré p. 24). Ainsi, il arrive que les producteurs, s’ils jugent la qualité insuffisante, renoncent à l’appellation. Ce fut le cas en 1974, en 1980, en 1984 et en 2001. Le macvin du Jura est la plus ancienne des AOC « produits ». L’appellation, obtenue en 1991, reconnaît les particularités propres à ce vin de liqueur (ou mistelle). C’est le seul vin de liqueur français obtenu à partir d’une eau-de-vie de raisin et non de vin. Il représente, en volume, 5 % du total des appellations jurassiennes. Si, sur le papier, le macvin peut être blanc ou rouge, l’essentiel de la production est en blanc. Le territoire de l’appellation recouvre l’ensemble des autres appellations jurassiennes. Le crémant du Jura (AOC depuis 1995) est produit sur l’ensemble du vignoble. La production est ancestrale. Dès la fin du XVIIIe siècle, les vignerons jurassiens maîtrisaient déjà la méthode de fabrication des vins effervescents. Le crémant du Jura représente environ 16 % de la production totale, pour un volume annuel dépassant les 17 000 hectolitres. Enfin, l’appellation marc du Jura (obtenue en 2015) est la dernière-née des AOC du Jura. C’est une eau-de-vie de couleur jaune ambrée. Sa fabrication doit être à base d’au moins trois des cinq cépages jurassiens, dont obligatoirement du Savagnin.

Produits sous signe de qualité

JURA’CHIC 5Tout ou partie du département se trouve dans les zones d’appellation d’autres produits sous le signe de la qualité, comme les volailles de Bresse (chapon, dinde, poularde, poulet), les beurres et crèmes de Bresse, le porc de Franche-Comté (IGP), la saucisse de Montbéliard (IGP), la saucisse de Morteau (IGP), le porc de Franche- Comté (IGP), et les IGP volailles de Bourgogne et Volailles de l’Ain.
Un pays dont l’agriculture repose essentiellement sur la production de fromages et de vins ne peut avoir que de solides traditions gastronomiques. Le Jura ne fait pas exception. Pas étonnant de trouver de nombreuses recettes où le fromage et/ou le vin sont les ingrédients de base. On peut citer la raclette, la fondue, la pomme de terre au morbier et au lard, le poulet au vin jaune.
« La gastronomie et les produits régionaux constituent le troisième motif de venue dans le Jura, en termes de séjour, après la découverte des sites naturels, des paysages et le calme, la tranquillité », expliquait Gérôme Fassenet, président du Comité départemental du tourisme du Jura, à l’occasion du Salon de la gastronomie de Lyon de 2018, où le Jura était l’invité d’honneur. De fait, dans le Jura, tourisme et gastronomie font très bon ménage. Entre route des vins, route du comté, parcours gourmands, les initiatives ne manquent pas. L’une des plus originales est l’activité « Vin mille lieux sous la terre » : une dégustation de vins dans les entrailles de la terre, dans une grotte sous le vignoble de Château- Chalon. Dans le Jura, le jurassique n’est jamais très loin.
Olivier Masbou

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La Percée du vin jaune

C’est, chaque année, l’événement du Jura avec un grand E. La Percée du vin jaune rassemble 45 000 visiteurs en moyenne. Elle est organisée tous les premiers week-ends de février par l’association des Ambassadeurs des vins jaunes. Créée en 1996, cette association réunit les gardiens du temple, garants de la mémoire de cet événement. Dans leur tenue officielle aux teintes dorées, ils escortent la pièce de vin jaune de 228 litres portée en procession. Bien que récente (la première percée remonte à 1997), cette fête s’est hissée au premier rang des fêtes viticoles de France. Au cours des réjouissances, qui durent deux jours, les premiers tonneaux de vin jaune sont mis en perce après les six ans et trois mois de vieillissement minimum. Ainsi, lors de la percée 2020, c’est la récolte de 2013 qui sera présentée. La pièce est bénie, au cours d’une messe solennelle, par l’évêque de Saint-Claude. La cérémonie s’accompagne de dégustation et d’une vente aux enchères de vieilles bouteilles. Et ces dernières peuvent monter très haut. En 2011, une bouteille datant de 1774 a été vendue 57 000 euros. La Percée du vin jaune est une fête itinérante. En 2020, elle se tiendra les 1er et 2 février à Ruffey-sur-Seille.
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Un pays qui ne manque pas de sel

Lons-le-Saunier, Salins-les-Bains, salines de Poligny et de Grozon… Les références au sel ne manquent pas dans le département du Jura. Le sel gemme du Jura est exploité au moins depuis l’Antiquité romaine et peut-être depuis la Préhistoire. Le lieu le plus emblématique est la Grande Saline de Salins-les-Bains, inscrite depuis 2009, sur la liste du patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco « en extension de la saline royale d’Arc-et-Senans » (dans le Doubs), inscrite en 1982. Ce qui est somme toute logique, puisque le site d’Arc-et-Senans était alimenté par un « saumoduc » long de 21 km, qui amenait les eaux faiblement salées de Salins. L’exploitation du sel à Salins est une histoire qui a commencé au VIIIe siècle de notre ère et qui s’est achevé en 1966, soit mille deux cents ans d’histoire, ce qui n’est tout de même pas mal. Aujourd’hui, le sel du Jura n’est plus utilisé, si ce n’est par le thermalisme. Et s’il existe encore une industrie du sel près de Dole, elle n’est plus alimentée par du sel jurassien.
Les%20quatre%20Glorieuses

Les quatre Glorieuses

Une cinquantaine de communes de Jura font partie de la zone d’appellation des volailles de Bresse. Il s’agit des communes situées le long de la limite départementale avec la Saône- et-Loire. Les éleveurs de cette zone sont évidemment concernés par la grande fête annuelle de l’appellation, Les Glorieuses de Bresse. Créées en 1862, Les Glorieuses sont à la fois un concours et une foire aux volailles. Elles se déroulent sur quatre jours, successivement sur quatre communes, toujours les mêmes : Bourg-en-Bresse, Louhans, Montrevel-en-Bresse et Pont-de-Vaux. Ces quatre villes bressanes sont toutes labellisées « Site remarquable du goût ». Le concours proprement dit juge les plus belles volailles roulées. De nombreux prix et distinctions sont attribués. À Louhans et à Bourg-en-Bresse, le producteur distingué par le Grand prix d’honneur reçoit un vase de Sèvres offert par la présidence de la République. À l’issue de la remise des diplômes, c’est l’ouverture du marché aux volailles fines de Bresse, chapons, dindes et poulardes. Cette année, Les Glorieuses se tiennent du 13 au 17 décembre.
www.glorieusesdebresse.com
Une%20AOC%20pour%20le%20bois%20du%20Jura

Une AOC pour le bois du Jura

Le bois du Jura a obtenu tout récemment, le 15 mars, son appellation d’origine contrôlée. C’est après le bois de Chartreuse (AOC depuis 2018), le deuxième produit forestier à accéder à un signe officiel d’origine et de qualité. L’Inao indique que le bois du Jura « se présente sous la forme de bois sciés. Il est produit à partir de sapins et d’épicéas issus de forêts de montagne gérées en futaie irrégulière et situées à plus de 500 m d’altitude ». Sa production s’étend essentiellement sur les départements du Jura, du Doubs et de l’Ain. Elle concerne environ 40 à 50 % de la production locale de bois, qui s’étend sur 235 000 hectares de forêts d’épicéas et de sapins. L’ Association française pour l’AOC bois du Jura regroupe 85 adhérents, dont 61 producteurs forestiers, 4 exploitants forestiers et 20 entreprises de scierie.