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Nos régions ont du goût

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Le terroir à la fête

L’avènement du tourisme a contribué à faire largement connaître les principales spécialités alimentaires basques.

L’avènement du tourisme a contribué à faire largement connaître les principales spécialités alimentaires basques, mais elles n’auraient pu connaître le succès sans la détermination des agriculteurs et artisans locaux à constituer des filières solides, notamment autour des AOC Ossau-Iraty, Jambon de Bayonne et Piment d’Espelette.

La dégustation des produits du terroir représente l’un des ingrédients indispensables d’une fête basque avec les chars, la course de vache, les bandas, les chants, la chemise blanche et le foulard rouge autour du cou. Et des fêtes, il n’y a pas que celle de Bayonne ; du printemps à la fin de l’automne près de 160 villages en ont accueilli l’an dernier. De quoi convaincre les millions de touristes des mérites des joyaux de la production alimentaire locale.
La gastronomie basque s’ancre dans une forte tradition agricole, l’agriculture constituant l’un des poumons économiques de la région avec le tourisme, maintenu notamment par le droit coutumier de l’installation d’un héritier à la ferme. Selon la chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques, le Pays basque compte 124 200 hectares de surface agricole utilisée et plus de 4 000 exploitations agricoles, toutes tailles et orientations confondues. Grâce à un climat favorable, les cultures sont variées : beaucoup d’élevage, horticulture, grandes cultures à l’est et au nord et cultures permanentes à l’ouest (vignes et vergers). L’élevage de bovins à viande (blonde d’Aquitaine en particulier), mais surtout d’ovins destinés à la production laitière, constitue la principale ressource agricole de la région, plus de 80 % des agriculteurs étant éleveurs d’herbivores (bovins, ovins, équins ou caprins). Le Pays basque, où l’on pratique encore beaucoup le pâturage en estive, est l’une des principales régions françaises de lait de brebis, majoritairement transformé en fromages.

L’élevage de brebis, poumon agricole

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Fleuron économique de l’agroalimentaire régional, la filière des fromages des Pyrénées a produit 14 800 tonnes de pur brebis en 2016, réparties entre une production laitière majoritaire, utilisant le lait de plusieurs éleveurs de la région, et une production fermière, issue d’éleveurs fabriquant exclusivement leurs fromages à partir du lait de leurs propres troupeaux. « Il existe une grande diversité dans les fromages des Pyrénées, explique la MOF fromager Laetitia Gaborit, avec trois formats principaux : les tomettes (400 g à 1 kg), les petites meules (environ 3 kg) et les tommes grand format, de 4 à 7 kg. Les fromages du Pays basque et du Béarn diffèrent. Ceux fabriqués dans le Béarn ont des pâtes fondantes, beurrées en bouche, tandis que les fromages fabriqués au Pays basque ont une texture plus ferme. La croûte donne des indices sur l’origine géographique. Les tommes à croûte jaune orangée, affinées dans le Béarn, ont une saveur plus douce que les tommes à croûte cendrée du Pays basque, aux saveurs plus marquées. » Une production émerge dans ce paysage très riche, celle de l’ossau-iraty, qui a obtenu l’AOC en 1980 et fait vivre près de 1 400 producteurs laitiers et 150 producteurs fermiers. Avec près de 4 100 tonnes de fromage, dont plus de 320 tonnes de lait cru de fromagerie et plus de 420 tonnes de fromages fermiers, ce produit pèse entre un quart et un tiers des volumes de fromages de brebis des Pyrénées. L’aire d’appellation recouvre la majeure partie des espaces agricoles du Pays basque qui en fournit le gros des volumes. L’AOP Ossau-Iraty, produite à partir de trois races locales (manech tête rousse, manech tête noire et basco-béarnaise) se reconnaît à son bandeau or et rouge inspiré des couleurs de son terroir. Afin de distinguer les fromages AOP Ossau-Iraty fermiers de ceux fabriqués dans une fromagerie et de l’AOP Ossau-Iraty d’estive, trois logos sont poinçonnés sur les croûtes pour les tommes à la découpe : une tête de brebis de face symbolise l’AOP Ossau-Iraty fermier (au lait cru exclusivement), une tête de brebis de profil, celle de l’AOP Ossau-Iraty de fromagerie (au lait cru ou traité thermiquement) et une edelweiss dans une montagne signale l’AOP Ossau-Iraty d’estive. Les productions du Pays basque se distinguent par des tailles plus petites que dans le Béarn (tommes de 2 kg contre 4).

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Des jambons candidats à l’excellence

L’autre grande spécialité régionale du Pays basque, ce sont bien sûr les charcuteries- salaisons, avec pour fer de lance le jambon de Bayonne marqué de la croix basque, ou lauburu. Depuis sa reconnaissance en IGP en 1998, couronnement d’un long combat, l’économie de la filière est florissante. Les tonnages se sont stabilisés l’année dernière à 1 170 000 jambons, dont 25 % sont produits sur neuf sites de production. Le principal producteur est Delpeyrat. Le jambon de Bayonne bénéficie notamment de l’engouement des Français pour le jambon sec, dont les ventes progressent régulièrement (+ 4,1 % en volume en un an selon le panel Kantar). Mais ce fleuron de la gastronomie du Sud-Ouest est également porté par un courant favorable à l’export. Si les ventes à l’étranger sont majoritairement destinées aux pays voisins, tels que l’Allemagne ou la Belgique, le jambon de Bayonne s’est frayé un chemin outre-Atlantique en obtenant en 2014 le très exigeant agrément pour le marché américain. Les actions du Consortium du jambon de Bayonne, syndicat professionnel qui assure la défense et la promotion du produit, sont actuellement ciblées vers les États-Unis, avec une opération de communication de trois ans, et une vers le Japon, qui commencera cette année. Un travail de promotion est également mené par les salaisonniers directement sur les marchés du nord de l’Europe. Ce solide ambassadeur régional s’appuie sur la filière « Porcs du Sud-Ouest », reconnue IGP depuis 2013 et dont tous les jambons de Bayonne sont issus. Si l’aire de production des cochons est vaste (22 départements des régions Nouvelle Aquitaine et Occitanie), l’aire géographique de fabrication du jambon de Bayonne est strictement délimitée au bassin de l’Adour : département des Pyrénées-Atlantiques et quelques cantons limitrophes au fleuve Adour dans les Landes, le Gers et les Hautes-Pyrénées. Les salaisonniers de la filière jambon de Bayonne sont donc tous localisés dans cette zone, dont une bonne partie au Pays basque, comme la coopérative artisanale basque du jambon de Bayonne, la charcuterie basquaise Aubard, ou Mayté et fils.

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Dans ce pays de grande tradition en matière de salaison, d’autres labels ou marques d’excellence se sont développés parallèlement à l’IGP, mettant en avant des exigences très élevées, notamment en termes de durée d’affinage. C’est le cas de l’Ibaïona, une petite filière qui compte quelques producteurs et salaisonniers, et qui joue la carte du 100 % basque. Les jambons proviennent exclusivement de porcs élevés au Pays basque (jusqu’à 11 mois et 180 kg minimum) et sont affinés en moyenne 15 à 21 mois, en séchoir à l’air libre.

Éric Ospital

La création du label Ibaïona rend notre produit très lisible par le consommateur.

« La création du label Ibaïona rend notre produit très lisible par le consommateur », témoigne le charcutier Éric Ospital dans un livre*, réalisé avec son ami Christian Etchebest, le boucher Hugo Desnoyer et le cuisinier Philippe Tredgeu. « Chaque jambon est élaboré avec sa carte d’identité, le nom de l’éleveur, le millésime, etc. Pour répondre à cette qualité, depuis trente ans nous travaillons avec les mêmes éleveurs qui ont adopté le label Ibaïona. Je vais les rencontrer régulièrement », confie Éric Ospital, qui fournit en viandes de porc et salaisons les Cantine du Troquet du chef Christian Etchebest. Autre filière d’excellence, le jambon des Aldudes, affiné dans un séchoir collectif à la frontière avec le Pays basque espagnol et notamment produit et commercialisé par une autre figure de la salaison régionale, Pierre Oteiza. Son jambon décroche régulièrement des médailles d’or au Concours général agricole.

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La région dispose enfin d’une filière porcine unique, celle du porc basque Kintoa, reconnue en AOP depuis octobre 2017. Les animaux, issus d’une race locale, le Pie noir du Pays basque, sont abattus à un âge minimal de 12 mois et maximal de 24 mois. Ils sont nés, élevés, engraissés puis abattus dans l’ouest du département des Pyrénées-Atlantiques et quelques communes limitrophes des Landes. La production est réduite (278 tonnes en 2016) et le nombre d’opérateurs limité (57 producteurs et trois transformateurs). Mais le prestige de l’appellation d’origine fait du Kintoa une locomotive pour l’ensemble de la production locale de salaisons.

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Entre vignes et vergers

Outre ces deux « poids lourds » économiques que pèsent les productions de fromages et de charcuteries de la région, quelques filières de qualité font preuve d’une belle santé, en grande partie grâce à l’exposition saisonnière aux touristes. Le Pays basque abrite un vignoble en progrès régulier, dominé à 85 % par l’appellation Irouléguy. Une cinquantaine de viticulteurs bénéficient de l’AOP Irouléguy. En 2010, la récolte de vin en AOP était de 6 740 hectolitres, soit plus de 93 % de la récolte totale du Pays basque. Les vins déclarés en AOP se répartissent à 60 % en vin rouge, 28 % en vin rosé et 13 % en vin blanc. Les vergers de la région produisent également quelques pépites. On pense bien sûr à la cerise d’Itxassou. La quinzaine de producteurs de ces fruits précoces à chair noire commercialise sa production en frais, en cerises au vinaigre, au sirop, en digestif et, bien sûr, en confiture, volontiers associée au fromage de brebis. Ils ont conçu une étiquette commune afin d’offrir plus de lisibilité au consommateur en créant la marque et le logo « Cerise d’Itxassou-Itsasu ». Une trentaine d’hectares de pommiers répartis dans 18 exploitations produisent le sagarno (ou sagardo), une boisson typique présente dans tout le Pays basque français et espagnol, qui accompagne le repas ou se déguste à l’apéritif. Ce « vin de pomme », à l’effervescence très légère et au titrage d’alcool élevé (entre 4 et 6°) ne peut prétendre à l’appellation « cidre ». Quant aux poiriers, leur production alimente en particulier la distillerie Brana à Saint-Jean-Pied-de-Port, qui fabrique l’un des alcools de poire les plus réputés de France.
Bruno Carlhian
* Effet bœuf et autres viandes, Éditions Gründ.

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La%20Cantine%20du%20Troquet%2C%20ambassadeur%20%C3%A0%20Rungis

La Cantine du Troquet, ambassadeur à Rungis

Bien que natif du Béarn, Christian Etchebest fait la part belle dans ses Cantine du Troquet à la gastronomie basque. « Ça fait partie de l’identité du restaurant », précise Stéphane Bertignac, qui dirige la Cantine de Rungis : agneau des Pyrénées, jambon de Bayonne Ibaïona, Trois fermes, et terrines de porc basque d’Éric Ospital, vins d’Irouléguy Harri Gorri de chez Brana, confiture de cerises noires, ossau-iraty, piment d’Espelette, etc. « Il y a même du sel de Salies », ajoute un client. « Attention, ça, c’est du Béarn », corrige Stéphane Bertignac, qui n’est pas basque mais a vite appris à ne pas faire d’impair !

 

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La deuxième vie du piment d’Espelette

Le piment d’Espelette est devenu le symbole de la cuisine basque et même du Pays basque. Cultivé depuis le XVIIe siècle dans la région et associé à la vie locale depuis des générations, cette épice a connu un coup de fouet avec la reconnaissance, en décembre 1999, de l’AOC pour le piment en entier frais, en corde ou en poudre. Le nombre de producteurs est passé d’une trentaine en 1997 à 190 et 14 entreprises de transformation et de reconditionnement pour la campagne 2016-2017. Le piment d’Espelette participe au maintien des exploitations familiales et à la création d’emplois autour du village éponyme et occasionne d’importantes retombées locales, notamment sur le plan touristique. D’une commercialisation centrée sur le Pays basque à l’origine, il bénéficie désormais d’une demande du marché national en épicerie fine, magasin de terroir et même d’une nouvelle demande à l’export émanant de professionnels des pays européens, du Canada et des États-Unis, mais aussi des pays asiatiques (Japon notamment). La production a atteint 160 tonnes l’année dernière.