Bruno ReydelBruno Reydel

Bruno Reydel

Pour fournir des produits de la mer de qualité et assurer une diversité à ses clients des marchés alsaciens, chaque semaine, Bruno Reydel prend la direction de Rungis.

Les marchés dans la peau

Bruno Reydel 1Pour fournir des produits de la mer de qualité et assurer une diversité à ses clients des marchés alsaciens, chaque semaine, Bruno Reydel prend la direction de Rungis. Passionné par le commerce non sédentaire, cet artisan d’exception a même décidé de revendre sa seule boutique.

Chaque semaine, le lundi après-midi, Bruno Reydel prend la direction de Rungis, accompagné d’un employé. Au volant d’un camion de 4 t, il parcourt les 516 km qui séparent le marché parisien de son petit village de Bischoffsheim (Bas-Rhin), non loin de Strasbourg. « L’hiver, précise-t-il, les ventes sont plus dynamiques et il y a les coquillages. Le camion ne suffit plus, alors j’accroche une remorque. »
Ce colosse qui fait partie de ceux qui se lèvent tôt, arrive à 23 heures à Rungis et commence à y ramasser ce que les mareyeurs lui ont envoyé en direct depuis les ports. Dès que la cloche retentit, il entreprend ensuite ses achats de complément sous le pavillon de la Marée. Cet Alsacien haut en couleur y est connu comme le loup blanc, notamment chez Demarne où il s’approvisionne régulièrement.
À 3 heures le camion chargé reprend la direction de l’Alsace pour arriver vers 10 heures, le mardi, dans les ateliers de la Poissonnerie Alfred Lauth à Bischoffsheim. La marchandise est attendue par les équipes pour être filetée, préparée. La maison qui fournit plusieurs restaurateurs, parmi lesquels des étoilés Michelin de la région, commence à expédier les commandes de cette clientèle.
La particularité de cette poissonnerie est de ne pas avoir de boutiques. Elle vend tout sur les marchés de la région et participe ainsi à une vingtaine de rendez-vous hebdomadaires. Les vendredis et les samedis, l’équipe qui comprend 12 personnes (15 en hiver) doit s’organiser pour assurer une présence simultanée sur cinq marchés. Cela représente un rude travail qui n’a jamais effrayé Bruno Reydel : « C’est en effet plus dur physiquement, mais on y gagne en chaleur avec la clientèle. » Il a même revendu la seule boutique que détenait son père, à Neudorf, parce qu’il estimait que « ce sont des clientèles différentes. En boutique, le client vient vous voir, il sait ce qu’il veut. Sur un marché, il achète de tout. Il faut le convaincre de s’arrêter chez vous. Il y a un dialogue, un jeu. Si je vois des poireaux dépasser de son cabas, je vais lui conseiller un poisson et une recette pour les accompagner. Ce sont ces échanges qui me passionnent ». La poissonnerie Lauth connaît une belle activité. Le transport du mardi, assuré par le patron, ne lui suffit pas. D’autres expéditions ont lieu en semaine via les transporteurs. La dynamique n’a même pas fléchi durant la crise sanitaire. L’engouement des Alsaciens pour les marchés a largement compensé la mise à l’arrêt forcée des clients restaurateurs de Bruno Reydel. Durant cette période, il a continué à visiter les patrons de restaurants, même s’ils n’avaient rien à leur vendre. Aujourd’hui, ils lui sont reconnaissants de ce soutien moral et leurs commandes sont reparties en flèche.
Ce poissonnier est un militant pour une pêche durable. Sur les conseils d’une amie, il a retiré des poissons comme la saumonette de son étal. Il reconnaît qu’il ne va pas jusqu’à retirer des poissons très demandés comme le cabillaud parce que « ce serait un suicide commercial ». En revanche, à Rungis, il affirme se tenir éloigné de grossistes peu sensibles à ce critère écologique.
Jean-Michel Déhais

Poissonnerie
Alfred Lauth
5, rue Émile-Mathis
67870 Bischoffsheim

Tél. : 03 88 48 60 20

www.poissonnerie-lauth.fr

12 salariés

L’histoire

En 1929, Alfred Lauth, le grand-père maternel de Bruno Reydel, a créé la poissonnerie, qui est restée depuis lors dans sa famille. En 1963, son gendre René Reydel a pris la suite et en 1981, Bruno Reydel a rejoint son père. Par la suite, Agnès, la femme du poissonnier, issue de la restauration, est venue développer le rayon traiteur, un axe commercial stratégique pour l’entreprise. En 2000, cet entrepreneur se lance dans la construction d’un nouveau local équipé d’un laboratoire pour la fabrication des produits traiteur à Bischoffsheim. Aujourd’hui présent sur les marchés du Bas-Rhin et du Haut-Rhin de Haguenau à Colmar, Bruno Reydel a aussi su transmettre sa passion pour les produits de la mer à son fils Antoine, 28 ans. Ce dernier s’est distingué dans la profession en devenant en 2011 Meilleur apprenti de France. Après avoir travaillé plusieurs années avec son père, le jeune homme vole désormais de ses propres ailes.

Parfois, je suis scandalisé quand je vois sur les marchés des opérateurs vendre des lottes de 300 g ou des céteaux. C’est du gâchis !