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MIN DE TOULOUSE OCCITANIE

Les professionnels contre les ventes sauvages

En Occitanie et en Nouvelle Aquitaine, les ventes sauvages de fruits et légumes en bord de route sont un vrai fléau.

À l’origine, la possibilité d’organiser des ventes au déballage sur le domaine public ou privé, en période de crise, pour écouler des fruits et légumes en surplus, était une bonne idée. Mais en Occitanie, cette pratique est depuis quelques années utilisée à tort et à travers pour vendre des marchandises importées dont on ne connaît pas la provenance. Des stands se dressent sur les parkings des boulangeries et des stations- service, ou en bordure des routes départementales, à des endroits passants où les automobilistes peuvent s’arrêter facilement.
La plupart du temps, on y propose des oranges (10 kg à 10 euros) et des citrons. Au printemps, fraises, melons, courgettes, pêches et nectarines prennent le relais. L’origine des produits n’est jamais affichée, encore moins la variété, la catégorie et le calibre, et on ne sait jamais si les quantités vendues « prépesées » font bien 10 kilogrammes. La mention « natural », qui ne correspond à rien au niveau réglementaire, ou « sans traitement après récolte » apparaît parfois. Certains vendeurs s’affichent même comme « récoltants ». « Les entreprises qui réalisent ces ventes sauvages sont connues, affirme Nicolas Oules, inspecteur technique régional fruits et légumes à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte). Elles sont environ cinq, travaillent en famille et créent des “établissements secondaires” mobiles, c’est-à-dire des stands qui fleurissent un peu partout. Ce sont des organismes tentaculaires. Nous avons contrôlé cinquante stands en Occitanie en 2017, ce qui a donné lieu à sept procédures contentieuses regroupant plusieurs constats sur l’année et sur plusieurs stands. Deux procès-verbaux administratifs pour défaut d’affichage de prix ont également été dressés. » La Direccte informe ensuite le procureur, mais, sur le terrain, rien ne se passe vraiment. Les contrevenants paient rarement les amendes et dès qu’un stand disparaît, un autre se crée un peu plus loin. Le temps de l’administration et de la justice n’est pas celui des commerces et de la consommation ! « Nous pouvons constater les infractions sur le respect des normes, les résidus de pesticides, l’affichage manquant… mais nous n’avons pas le pouvoir de faire fermer un de ces points de vente », confirme Élisabeth Rouault-Hardoin, directrice de la direction départementale de la protection des populations (DDPP) de la Haute-Garonne.

Des réseaux bien organisés

« Ces personnes sont très bien organisées, mobiles et connaissent la loi mieux que nous », souligne Didier Pigasse, grossiste au MIN de Toulouse. Elles semblent savoir en effet sur quels emplacements en bordure de route départementale on peut s’installer sans demander l’autorisation du maire et rester plus longtemps que sur le domaine public municipal. Ou encore le fait que, pour s’installer sur un site privé, une simple déclaration suffit. Aucune permission à obtenir. Tout se fait, par ailleurs, par écrit, et l’administration n’est pas toujours prévenue de la création de stands, alors qu’elle devrait recevoir un double des déclarations. « Si l’on pouvait passer à la télédéclaration, ce serait un progrès pour nous, car nous aurions une base de données sur laquelle nous appuyer », reconnaît la directrice de la DDPP. En attendant, la Direccte Occitanie a édité un dépliant pour les élus locaux sur les règles des ventes au déballage. « La loi précise notamment que celles-ci ne peuvent pas excéder 60 jours par an dans un même arrondissement, note Chrystel Teyssèdre, présidente de Saveurs commerce. Nous avions fait des propositions pour que ce périmètre soit étendu à la région. Mais le gouvernement les a refusées, au nom du principe de la liberté de commerce. » Ainsi, en Haute-Garonne où l’on compte trois arrondissements, un vendeur itinérant peut légalement exercer six mois par an, voire plus s’il n’est pas contrôlé !

 

Question locale ou nationale ?

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Que faire donc contre cette injustice ? D’un côté on demande aux agriculteurs, aux importateurs, aux grossistes, aux primeurs de respecter des lois, de payer des taxes et de garantir la qualité sanitaire des produits qu’ils commercialisent. De l’autre, des vendeurs s’installent où ils veulent pour brader des produits importés sans aucune traçabilité en toute impunité. Pour Jean-Jacques Bolzan, adjoint au maire de Toulouse et président de la Fédération des marchés de gros de France, venir à bout de ces ventes illégales est une question de volonté locale. « À Toulouse, nous y travaillons avec le procureur et les services de l’État. Saisir les marchandises est plus efficace que les procès-verbaux. Nous avons déjà obtenu des résultats avec un autre genre de vendeurs illégaux en 2001. Aujourd’hui, c’est tous ensemble que nous devons agir pour faire cesser ces trafics. » « Ces ventes sauvages doivent être considérées comme une cause nationale, ajoute Christian Berthe, président de

l’Union nationale du commerce de gros en fruits et légumes. Les quatorze “familles” d’Interfel doivent se réunir pour rédiger une nouvelle définition de la vente au déballage. Et pourquoi pas se porter partie civile lorsqu’une infraction remonte au procureur, si l’on en est averti ? »
Pour les professionnels, il est également urgent d’informer les consommateurs que ces pratiques sont déloyales. Un tract sera édité par Saveurs commerce et fourni aux primeurs pour qu’ils puissent le distribuer à leurs clients. « Pour les consommateurs, nous devons rester positifs, conclut Christian Berthe. Nous ne devons pas seulement décrier mais aussi expliquer que nous sommes loyaux, que nous payons nos charges et que nous respectons des règles de bonnes pratiques. »

Florence Jacquemoud

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En bref

Guivarc’H expose sa marchandise
Présente sur le MIN de Toulouse Occitanie avec une activité logistique de vente en gros de produits de la mer, la société Guivarc’H ouvre une zone de présentation de sa marchandise, afin que ses clients puissent venir la voir et acheter physiquement, comme cela se fait sur le marché de Rungis. Le grossiste achète 90 % de ses volumes à de petits bateaux de pêche et sur les criées des ports français. Les deux grosses journées d’arrivage sont le mardi et le vendredi, mais l’objectif de Mickaël Seguin, en charge du développement de l’entreprise, est de présenter tous les jours une offre cash sur le MIN, y compris l’après-midi. Une nouvelle organisation qui permettra la création de plusieurs emplois. « Nous aimerions également mettre en avant les produits occitans, en provenance des criées méditerrané­ennes de Port-la-Nouvelle, Saint-Cyprien et Sète, et organiser, chaque vendredi matin, des animations à destination de nos clients restaurateurs, qui viendraient cuisiner sur place, autour de quelques huîtres et d’un petit vin blanc. »
Guivarc’H possède deux marques propres d’huîtres, sélectionnées en Irlande et poussées sur l’île d’Oléron et à Cancale, la spéciale Bourgeois et la spéciale Napoléon. L’entreprise veut également développer une marque de poissons adossée à un cahier des charges, afin de proposer aux consommateurs et aux restaurateurs une identification garantissant une pêche en petits bateaux. Elle compte enfin sur l’arrivée d’autres opérateurs en cash sur le MIN, pour renforcer l’offre physique et créer une dynamique. Son modèle, le marché de Rungis, véritable référence qualité à Paris.
F. J.