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Les Français s’emballent pour le vrac

Leaders mondiaux de la vente en vrac

Les Français s’organisent et, grâce à l’association Réseau Vrac, commencent à se structurer afin de donner à ce secteur toutes les garanties nécessaires à sa pérennité.

Les Français s’emballent pour le vrac 3La Recharge, Le Bocal, Le Gramme de folie, Day by day… Les épiceries 100 % vrac ont le vent en poupe. De plus en plus de points de vente ouvrent leurs portes aux quatre coins de la France et on estime aujourd’hui que 1,5 % de nos concitoyens achètent des produits en vrac au moins une fois par mois. Moins de déchets, moins de gaspillage alimentaire et moins de dépenses, le concept attire les consommateurs français de tous horizons. « Le vrac séduit tous les types de population, tous les âges, tous les milieux sociaux, explique Célia Rennesson, directrice de l’association Réseau Vrac. Ce type de commerce répond toujours au moins à un besoin. Personnes âgées en quête de lien social, étudiants à petit budget, personnes à la fibre écologique, d’autres qui trouvent ça ludique, celles qui cherchent à faire des économies… Le vrac est, à produits comparables, 5 à 40 % moins cher que l’équivalent préemballé. » Créée en mars 2016, l’association Réseau Vrac rassemble tous les professionnels du vrac, franchisés, indépendants, fournisseurs de produits et de services. Aujourd’hui, Réseau Vrac est la seule organisation de ce secteur au niveau mondial, elle compte plus de 350 membres issus de France et d’ailleurs, avec une nouvelle demande d’adhésion chaque jour. « Avec 140 épiceries spécialisées dans la vente en vrac, la France est le premier pays au monde sur ce secteur. À ce jour, aucun autre pays ne s’est organisé pour accompagner son développement, reprend Célia Rennesson. Notre association Réseau Vrac, ambitionne de structurer ce secteur naissant. » Aujourd’hui, le vrac est présent quasiment partout, que ce soit dans les magasins spécialisés bio, tels que Biocoop, Bio c’ bon, Naturalia, que dans les hypermarchés (Auchan, Carrefour, Intermarché) et les supérettes. C’est un phénomène qui touche quasiment tout le secteur de la distribution. « Il y a les épiceries spécialisées dans le vrac dont c’est le métier, mais pour tous les autres, cette activité reste marginale, aussi bien pour la GMS, que pour les réseaux spécialisés bio où le vrac ne dépasse pas 10 % du chiffre d’affaires. »

Le vrac, un concept bien pensé

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À ce stade, il convient de faire un point sur ce que l’on appelle « vrac ». Pour comprendre, il faut distinguer le vrac du réfrigérateur du vrac du placard. Le vrac du réfrigérateur n’a jamais cessé d’exister. Il s’agit de fruits et légumes, de charcuterie, de fromage à la coupe ou de crémerie… Le renouveau que l’on constate aujourd’hui concerne le vrac du placard, c’est-à-dire des denrées alimentaires sèches, pâtes, riz, les épices… ainsi que certains produits non alimentaires ménagers, lessives, cosmétiques, dentifrices… Et comme pour toute nouvelle activité, le vrac souffre d’un certain manque de cadre. « C’est un secteur où il y a encore beaucoup de vide juridique, précise Célia Rennesson. Il n’y a aucune règle, aucune procédure. Il faut professionnaliser les pratiques pour permettre au vrac de se développer dans les meilleures conditions et de façon pérenne. Le but de Réseau Vrac c’est que demain, un maximum de consommateurs puissent faire leurs courses en vrac de façon sécurisée. Pour cela, il faut constituer une nouvelle filière économique. » Dans un premier temps, il s’agit de rassembler et de fédérer l’ensemble des acteurs, d’homogénéiser les pratiques en matière de réglementation et d’hygiène, et de lever les barrières à son développement. « En collaboration avec une avocate et une hygiéniste, nous avons rédigé un guide juridique de la vente en vrac, qui détaille toutes les bonnes pratiques. Nous avons également mis en place des formations permettant d’accompagner les entrepreneurs qui souhaitent ouvrir un commerce de vente en vrac. Une autre formation sur les bonnes pratiques d’hygiène est disponible pour tous les responsables d’épicerie ou de rayon vrac… de façon à être capables d’avoir un magasin ou un rayon vrac irréprochable en termes d’hygiène, de traçabilité et de sécurité alimentaire. » Un autre chantier consiste à desserrer quelques freins à la vente en vrac, notamment la vente de produits assortis d’un signe de qualité IGP, AOP, AOC… « Par nature, le cahier des charges de ces denrées-là est incompatible avec la vente en vrac puisqu’il comporte une obligation de conditionnement sur la zone de production. Lentilles du Puy, vinaigre de Modène, piment d’Espelette… tous ces produits ne peuvent pas aujourd’hui être vendus en vrac. Il faut discuter au cas par cas pour chaque produit. »

Il y a d’autres grands sujets. « L’huile d’olive, par exemple, est réglementairement interdite à la vente en vrac, expose la directrice de Réseau Vrac. Il y a des façons de contourner la loi, mais c’est très contraignant. Une épicerie qui ne peut pas vendre d’huile d’olive, l’une des plus consommées en France, se coupe d’un marché très important. » Réseau Vrac a entrepris des discussions avec des organes de contrôles, comme la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, et fait parvenir quelques recommandations au ministère de l’Agriculture. « Petit à petit, on avance », conclut Célia Rennesson.

Caroline Maréchal

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David Sutrat, cofondateur de Day by day

« Nous sommes à la recherche de nouveaux produits en permanence »
Comment a commencé l’aventure Day by day ?
Tout a débuté fin 2011. Mon associé, Didier Onraita, et moi, avions envie d’apporter une contribution positive à la société, tout en restant sur notre territoire d’expertise qu’est la distribution. Day by day est un concept basé sur des petits magasins de proximité en centre-ville, et sur une nouvelle façon qu’ont les consommateurs de se réapproprier leur budget pour leur consommation alimentaire, sur fond de développement durable. Le projet était déjà dans nos têtes au début des années 2000. Nous voulions lancer un concept de magasins 100 % vrac en centre-ville, à côté du boucher, du primeur, du boulanger… là même où la plupart des épiceries ont disparu. Day by day est donc né pour apporter au consommateur une nouvelle solution pour faire ses courses d’épicerie en maîtrisant son budget, grâce à la possibilité d’acheter la juste quantité, et de réduire son gaspillage alimentaire et ses déchets.
Concrètement, un magasin Day by day c’est comment ?
Pour que ça marche, il faut une offre sérieuse, importante et suffisante. Nos 34 magasins sont installés dans des villes de 50 000 habitants. Ils sont tous en franchise et proposent 750 références, sur une surface commerciale moyenne de 60 m2 : épicerie salée, sucrée, droguerie et produits d’hygiène et, depuis peu, animalerie avec une offre de croquettes et litières. Nous avons mis deux ans à convaincre Purina de nous fournir des croquettes pour chats et pour chiens très qualitatives en vrac, et nous avons réussi. Comme quoi, les choses avancent, même auprès des plus grands industriels.
Avez-vous séduit d’abord les plus militants ?
Nos clients se divisent en trois principaux profils. Les « engagés », qui représentent 30 à 40 %, ont entre 25 et 40 ans, sont plutôt des femmes, et sont dans une démarche volontariste de modification de leurs habitudes de consommation. Les « curieux », majoritaires avec 50 à 60 %, entre 40 et 60 ans, ils habitent à proximité du magasin ou travaillent à côté, et se laissent séduire par l’offre, l’accueil, les conseils et rentrent dans la démarche sans véritable intention. Enfin, il y a les « nostalgiques », qui sont moins de 10 %, 60 ans et plus, qui ont une relation régressive avec le magasin, du style “Ah, c’est comme dans le temps ”. Nous avons des gamins qui sortent de l’école et viennent acheter des bonbons ou des biscuits, des mamies qui viennent tous les jours faire leurs courses, des trentenaires qui viennent à vélo avec leurs sacs en toile de jute, des mères de famille, des étudiants… C’est très grand public !
Quels sont vos objectifs de déploiement à court terme ?
Notre objectif, c’est une centaine de magasins d’ici à la fin 2019. Nous faisions 500 000 euros de chiffre d’affaires il y a deux ans, nous allons faire 4 millions cette année, et cela, uniquement avec la centrale qui fournit les magasins. Si on ajoute les points de vente, on arrive aux alentours de 9 millions d’euros. C’est fou, car on part de rien ! Nous ambitionnons un développement international. Nous avons récemment ouvert un premier magasin à Bruxelles. À court terme, nous visons la Belgique, les Pays-Bas, l’Allemagne, les États-Unis, le Canada… Il faut aborder les différents marchés avec une réelle compréhension du fonctionnement des consommateurs dans chacun des pays, pour ensuite s’adapter.
Comment sélectionnez-vous les produits ?
Avec Day by day, notre vocation est de raccourcir les circuits. Nous essayons d’être proches des producteurs, de travailler en direct avec eux. Les produits sont importés seulement s’ils ne sont pas produits en France. Nous sommes à la recherche de nouveaux produits en permanence. Nous avons une équipe de trois personnes en charge des marchés qui ont pour mission d’identifier et de créer de nouvelles opportunités. Nous sommes aujourd’hui assez gros pour aller voir des producteurs et demander tel produit, avec tel conditionnement, telles contraintes… Par exemple, nous allons lancer en début d’année de l’alcool en vrac, gin, vodka, cognac… produits en France, de qualité, à des prix compétitifs.
Quelle place donnez-vous au bio ?
Le bio n’est pas notre priorité, nous, c’est le vrac. Notre offre compte un tiers de bio, soit un peu plus de 200 références, pour deux tiers de produits conventionnels – tout ce qui n’est disponible en bio. Notre combat, c’est de proposer aux gens une alternative non emballée de produits d’épicerie. Ce qui pousse les consommateurs à venir chez Day by day, c’est de pouvoir acheter ce dont ils ont besoin et d’avoir le choix. Nous sommes sur un marché de l’offre. Si vous proposez aux consommateurs du vrac pratique, de qualité, compétitif, proche de leur domicile, il y a peu d’objections. Le vrac devient une évidence dès qu’on l’expérimente, à condition que l’offre soit suffisamment large. C’est un mode de consommation fidélisant. Nous ne voulons surtout pas en faire un concept réservé à une élite, nous nous adressons à tous, avec des produits du quotidien, des premiers prix comme des produits plus qualitatifs, il y a le choix.
Avez-vous des projets concrets à venir ?
Notre principal projet est de faire revenir certaines productions en France, comme les lentilles corail. C’est un de nos défis. Nous sommes dans une concertation étroite avec nos producteurs. Et comme nous pouvons désormais assurer un certain débouché des produits, on peut espérer que des variétés aujourd’hui disparues en France vont pouvoir être replantées.