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Des pâtes oui, mais des françaises

Féculent le plus consommé dans le pays, les pâtes sont plébiscitées par les Français. Ils font par ailleurs de plus en plus attention à l’origine nationale.

Les Français sont de grands consommateurs de pâtes. Certes, avec une consommation moyenne de 8,3 kg par an et par habitant, ils sont loin derrière les Italiens, champions du monde incontestés avec 23,1 kg par an et par habitant. Mais ils sont dans le top 10 des amateurs de pâtes (voir graphique). Et ils sont de plus en plus nombreux à privilégier l’origine France.

La production française de blé dur s’élève à 1,5 million de tonnes en 2019, pour une surface de 246 000 ha. 592 747 tonnes de blé dur ont été transformées dans les semouleries françaises. La quantité de semoule produite s’élève à 453 736 tonnes, dont 361 566 tonnes sont utilisées pour la fabrication de pâtes et de couscous. Au final, la production française de pâtes alimentaires sèches s’élève à 235 000 tonnes, pour une consommation de 537 251 tonnes. Si 18 % de la production nationale est exportée, nous importons, principalement d’Italie, 64 % de nos besoins. Sept usines assurent la production hexagonale de pâtes. La France est le troisième producteur européen de pâtes avec 5 % du volume total, derrière l’Italie (74 %) et l’Allemagne (7 %). Les pâtes sont par ailleurs le féculent le plus consommé par les Français (hors pommes de terre fraîches). En valeur, le marché s’est élevé à 856,1 M€* en 2020, loin devant le riz (497,2 M€), les semoules et autres céréales (278,1 M€), les légumes secs (105,4 M€) et les purées de pommes de terre déshydratées (84,2 M€). Le marché des pâtes n’échappe pas non plus à l’engouement des consommateurs pour le drive. Selon Nielsen, les ventes ont augmenté de près de 40 % en valeur pour ce format de distribution en 2020. Les semouliers-pastiers nationaux ont bien intégré cette demande des consommateurs.

À l’occasion de la Journée nationale blé dur (lire aussi encadré), Pascale Hebel, directrice du pôle consommation et entreprises du Credoc, interpellait les professionnels de la filière sur cette attente sociétale. «La crise sanitaire a engendré des changements très forts en matière notamment d’attentes écologiques, avec une accélération de la demande en bio et un renforcement du local. Les consommateurs veulent des produits français et qui assurent une juste rémunération des producteurs. Les Français se soucient également de leur santé, ce qui passe par le rejet des intrants relevant de la chimie de synthèse et une attention particulière sur la qualité des nutriments. La filière blé dur doit donc s’orienter sur des produits de luxe que sont les produits bio, ou agroécologiques pour servir plus de monde et miser sur la génétique pour améliorer les blés durs en nutriments et en vitamines.»

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Une gamme de produits Zéro résidu de pesticides

Le secteur n’est pas insensible à ce besoin de proximité des consommateurs français. Et il tente d’y apporter des réponses dans la mesure du possible.

Ainsi, Lustucru, qui fête ses 110 ans cette année, a récemment créé une filière blé dur en Normandie. L’entreprise met en avant ses partenariats avec les agriculteurs, que ce soit pour la production de blé dur ou pour les œufs. Au début février 2020, Lustucru a démarré un partenariat avec 26 éleveurs de poules élevées en plein air, dans les Hauts-de-France, à moins de 200 km de son usine.

Chez Alpina Savoie, « notre gamme origine France remonte à 1997 en conventionnel et à 2011 en bio, rappelle Antoine Chiron, responsable filière, toujours à l’occasion de la Journée nationale blé dur. Depuis deux ans, on travaille avec un fournisseur localisé en Camargue et capable de nous fournir des blés durs bio, pas même traités avec des produits homologués en bio. Nous sommes par ailleurs engagés dans un programme d’impact comparé d’itinéraires conventionnel et bio non traité sur la biodiversité, qui devrait à terme nous aider à accompagner les producteurs dans l’évolution de leurs pratiques. Les pesticides, c’est un vrai sujet et tous les chemins sont bons pour trouver des alternatives ». Alpina Savoie est aussi, à ce jour, la seule entreprise de la filière grandes cultures membre du collectif Nouveaux champs et à proposer une gamme de produits Zéro résidu de pesticides. La marque a par ailleurs lancé en 2020 les premières pâtes issues de blés certifiés HVE (Haute valeur environnementale) pour une partie de son offre.

Panzani, leader du marché en France, met en avant la filière blé Responsable français que l’entreprise a contribué à créer. Cela lui permet d’obtenir «un blé de qualité, cultivé et conservé de manière responsable par et pour des agriculteurs respectueux de l’environnement», explique l’entreprise. La marque vient également de lancer une gamme de pâtes complètes et bio. En Alsace, Heimburger (pâtes Grand-Mère) et Valfleuri commercialisent les pâtes IGP d’Alsace, les seules pâtes en France à avoir obtenu ce signe de qualité. «La spécificité des Pâtes d’Alsace réside dans leur recette à base de 7 œufs frais au kg de semoule de blé dur, associée au savoir-faire des producteurs ancrés depuis des générations dans les traditions culinaires alsaciennes», précise le cahier des charges.

Notons enfin une tendance qui commence à monter, même si l’on ne dispose pas encore de statistiques pour l’évaluer : les pâtes fabriquées à la ferme par des agriculteurs souhaitant diversifier leurs activités.

Si la filière pâte se porte plutôt bien, elle doit être vigilante. « Après avoir progressé de 30% entre 2003 et 2016, la consommation s’est repliée de 3% au cours des trois dernières années, constate Pascale Hebel. Les pâtes sont concurrencées par les légumes, les légumineuses et d’autres céréales telles que le quinoa. »

Olivier Masbou

*Source Iri

 

Des pâtes oui, mais des françaisesUn plan de relance pour la filière blé dur

La profession a décidé de s’engager dans un plan de relance pour le blé dur. En effet, la production nationale est en fort recul. La surface et la production françaises de blé dur ont été divisées par deux en dix ans, une baisse qui affecte les quatre bassins de production. Plusieurs raisons expliquent ce recul : les risques particuliers liés à la culture du blé dur, avec notamment une forte volatilité des rendements et des qualités, selon les conditions climatiques de l’année. Autre facteur, « l’absence d’incitations significatives dans la politique agricole française», déplorait Éric Thirouin, président de l’AGPB (Association générale des producteurs de blé et autres céréales) le 2 février dernier à l’occasion de la Journée nationale blé dur. La moyenne d’âge élevé des producteurs fait par ailleurs craindre que cette baisse s’amplifie dans les prochaines années. «Nous sommes dans une période clé», ajoute Éric Thirouin. La filière doit profiter des discussions en cours sur la future Politique agricole commune, et la rédaction du plan stratégique national. «C’est donc le moment d’avoir collectivement les idées claires et d’avoir une vision partagée pour la filière.» C’est dans ce but que l’ensemble des acteurs (producteurs, industriels, etc.), dans le cadre d’Intercéréales, l’interprofession des céréales, a décidé de lancer une étude stratégique en vue d’améliorer la compétitivité de la filière et de relancer la production et la transformation du blé dur en France. « L’objectif est de redynamiser la filière et de faire du blé dur une culture d’avenir et rémunératrice pour les producteurs », conclut Éric Thirouin. Le blé dur est la quatrième céréale produite en France. Il est principalement cultivé dans le sud où il profite d’un climat chaud et sec, mais également en Centre-Val de Loire et même dans le Grand Est !

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Le boom des pâtes fraîches

Le marché des pâtes fraîches est en plein développement. Les Français en ont consommé 85 600 tonnes en 2020*, soit une hausse de 5,9 %. Ce secteur a réalisé un chiffre d’affaires de 523 M€ (+ 8,4 %). Le marché est tiré par les gnocchis qui réalisent 28,9 % du chiffre d’affaires pour une hausse de 20,7 %. À eux seuls, les gnocchis à poêler pèsent 123 M€. Les pâtes fraîches farcies sont en tête (56,1 % en valeur, + 5,2 %), les pâtes « simples » ferment la marche (15 % du marché en valeur, stable par rapport à 2019). Les fabricants rivalisent d’imagination pour capter cette clientèle en lançant nouveauté sur nouveauté, comme les pâtes farcies à différents fromages AOP (comté, ossau-iraty bleu d’Auvergne.) en variant les formats, ou en proposant des portions snacking. *Source PB, cité par Linéaires, novembre 2020