Quand Gilles Smadja reprend en 2005 une petite boutique de produits « naturels et diététiques » à L’Haÿ-les-Roses (94), le « bio » n’est pas encore un phénomène de société. « À l’époque, la diffusion des produits bio était l’apanage d’enseignes spécialisées comme La Vie Claire, Biocoop et les indépendants, explique ce passionné venu à l’épicerie bio sur le tard. Les enseignes de la grande distribution n’avaient pas encore investi le secteur comme elles allaient le faire quelques années plus tard, comme Carrefour avec Bio C Bon. »
La demande s’accroissant, Gilles Smadja se résout en 2012 à quitter son échoppe pour un local plus spacieux de 85 m2 en centre-ville. « On peut dire que le défi a été relevé », se félicite aujourd’hui le commerçant. Le nombre de références est passé de 2 000 à 5 000 couvrant une grande partie de l’univers de la bio : fruits et légumes, produits frais et d’épicerie mais aussi produits d’hygiène, cosmétiques et ménagers. « Entre-temps, nous avons fidélisé une clientèle de proximité, des personnes attachées à la qualité des produits et à leur incidence sur l’environnement, des mères de famille, des personnes âgées, etc. »
Pas d’inflation des prix
La clé du succès, Gilles Smadja estime qu’elle tient au respect d’un bon rapport qualité-prix. « Beaucoup de magasins bio ont eu tendance ces dernières années à participer à une inflation des prix tout à fait contre-productive, estime Gilles Smadja. Si l’on veut faire venir une clientèle de tous les jours, il faut proposer des produits accessibles à tous. » Et d’ajouter : « Je suis par exemple partenaire de la marque Elibio, qui a été créée par un collectif d’épiciers bio indépendants. Elle nous permet de proposer du riz ou de la farine de bonne qualité et d’origine française à des prix compétitifs, car nous prenons peu de marge. »
En matière de sélection, le commerçant a également su profiter de sa proximité géographique avec le Marché de Rungis. « Je fréquentais déjà le Marché avant l’inauguration du pavillon bio en 2016, se souvient-il, mais l’ouverture de cette halle a changé beaucoup de choses pour nous. Je m’y rends quasiment quotidiennement pour y acheter 80 % de mes produits frais et une partie du sec. Ma politique, c’est de faire du flux tendu. Cela garantit une fraîcheur exceptionnelle, ce qui est, bien sûr, un atout que mes clients connaissent », affirme le commerçant.
Client régulier de Pronatura, Dynamis ou Desmettre bio pour les fruits et légumes, Gilles Smadjda s’approvisionne également en produits laitiers et à base de soja auprès de Triballat-Noyal, ou encore en charcuterie-traiteur et boissons avec Dispere. « Lorsque Dispere s’est lancé dans le vin, ils nous ont proposé une gamme d’un très bon rapport qualité-prix. Ça m’a convaincu, et depuis le rayon marche très bien », se réjouit-il.
Bruno Carlhian
L’Haÿ Nature
30, rue Jean-Jaurès
94240 L’Haÿ-les-Roses
Tél. : 01 46 65 85 51
3 personnes travaillent en permanence à L’Haÿ Nature
5 000 références bio sont proposées dans ce magasin certifié Ecocert
L’histoire
Après un BEP commerce, Gilles Smadja a commencé à travailler dans la confection avant de faire carrière dans le bâtiment.
À l’âge de 43 ans, ce passionné
de produits naturels et de compléments alimentaires décide de changer de vie en reprenant la minuscule échoppe d’une figure historique de la bio en région parisienne. Il emménage en 2012 dans un local plus spacieux, mais en conservant la même exigence
à l’égard de la qualité des produits mais aussi dans le souci de la rémunération des producteurs.
La concurrence avec les grandes enseignes risque d’être difficile à vivre dans les prochaines années pour les enseignes spécialisées et les indépendants comme moi. Il ne faudrait pas que la bio, qui vise à rémunérer justement les producteurs, y perde son âme au profit de la recherche de rentabilité.